Au Mexique, traditions préhispaniques et rituels chrétiens se sont amalgamés pour célébrer dans la joie le jour des morts.
Ce jour-là, les familles se réunissent et rendent hommage à leurs défunts. Non seulement, on visite les cimetières, on élève des autels dédiés à la mémoire des ancêtres, mais on partage même les repas avec eux. Des figurines en forme de squelette envahissent les maisons et l’espace public. C’est à qui imaginera les scènes les plus cocasses. Avec humour, le macabre se fait miroir critique de la société tandis que, pour leur plus grand plaisir, les enfants se régalent de calaveras, crânes en sucre parés de mille motifs. Au fil du temps, des figures se sont imposées telle la Catarina gravée par José Guadalupe Posada (1852-1913). Avec son chapeau fleuri orné de plumes d’autruche, elle est devenue selon l’écrivain-essayiste Carlos Mosivais « emblème de la mexicanité ». Sa beauté singulière a inspiré des artistes comme Diego Rivera qui l’a placée au centre de son célèbre tableau Songe d’un après-midi à la Almenada Central aux côtés de Frida Kahlo.
Dans Dia de Muertos, pop-up que viennent de réaliser Anne-Florence Lemasson et Dominique Ehrhard, la Catarina vêtue d’une longue robe cintrée donne le bras à un dandy moustachu, en redingote, coiffé d’un chapeau claque. C’est l’un des cinq petits théâtres en relief qui composent cet album dans lequel le lecteur est entraînés au coeur de la fête des disparus. Les squelettes s’y précipitent à cheval, en cariole, en trottinette… à vélo comme dans la fameuse gravure Las bicicletas de Posada. On poursuit avec les étals colorés du marché, avec un crâne qui préside au festin mortuaire et l’on termine au rythme de la musique des mariachis en sombrero qui font danser les couples toute la nuit.
Une fois encore, Dominique Ehrhard et Anne-Florence Lemasson nous surprennent. Leurs découpages, leurs mises en relief et en mouvement atteignent la perfection, capables qu’ils sont de faire participer, comme pour de vrai, le lecteur à la fête.
Michel Defourny


