Dans mon petit livre « De quelques albums qui ont aidé les enfants à découvrir le monde et à réfléchir » paru à L’école des loisirs en 2013, j’avais réservé un chapitre aux fêtes qui structurent l’année, resserrent les liens familiaux et surtout embellissent un quotidien parfois monotone. Enfant, on les attend avec impatience, on les vit avec intensité, et plus tard, devenu grand, on s’en souvient avec nostalgie. Dans cet ouvrage, j’avais retenu quelques titres emblématiques qui évoquent des fêtes marquantes d’ici ou là. Ainsi, dans Une Cloche pour Ursli, Selina Chönz et Alois Carigiet racontent comment, dans l’Engadine, les garçons chassent l’hiver à grands coups de cloches. Ce vacarme lui fait si peur qu’il cède la place au printemps. Avec Nine days to Christmas, a story of Mexico de Marie Hall Ets et Aurora Labastida, le lecteur prend part au rituel complet de la célébration de la Nativité qui s’achève au moment où la « pinata » est brisée et répand son flot de friandises pour la plus grande joie des petits.
A ma sélection d’alors, j’ajouterais volontiers aujourd’hui La Lanterne de Tonton de WANG Yage et ZHU Chengliang.
Où que vous vous baladiez en Chine, non seulement dans les quartiers anciens, historiques ou touristiques, mais également dans les endroits les plus reculés, vous serez impressionné(e) par la multitude de lanternes rouges accrochées aux murs des maisons, alignées le long des rues, des ruelles et des canaux.
Par-delà, les lanternes sont associées à un moment festif spécialement réservé aux enfants. La coutume veut qu’au troisième jour de l’année, les oncles maternels offrent à leurs neveux et nièces des luminaires de papier. Décorés de nœuds rouges, leurs formes sont variées, de la pastèque à la fleur de lotus, tandis que d’autres sont pliés en accordéon de toutes les couleurs… Dans l’album de WANG Yage et ZHU Chengliang publié par les éditions HongFei, Zaodi, une fillette munie de son cadeau, rejoint ses amies, à la tombée du jour. L’excitation est d’autant plus grande que le village est recouvert de neige. Ensemble, les petites copines bien emmitouflées affrontent le froid glacial et le vent dont le souffle fait vaciller la flamme des lampions ; il éteint même celle de Zaodi, immédiatement rallumée avec un bout de bougie. L’arrivée soudaine des garçons sème la pagaille et provoque des chutes mais très vite le rire l’emporte. Au moment d’aller se coucher, les filles se promettent de se retrouver dès le lendemain matin. Lorsqu’arrive le quinzième jour, la fête se termine. Les pétards éclaboussent le ciel… Vite, une dernière ronde… Et la coutume veut que l’on enflamme alors les lanternes, en faisant un vœu pour les tontons. Ne restent dès lors que des petits tas de cendre. Heureusement, Zaodi sait que le nouvel an reviendra… et son tonton aussi !
Les illustrations de ZHU Chengliang sont joyeuses comme les fillettes dont les vêtements colorés sont aussi lumineux que leurs lanternes. Pour traduire la magie de ces nuits enchantées, l’artiste a opté pour un style bon enfant en parfaite adéquation avec le récit de WANG Yage.
Michel Defourny