Adrien Parlange, Les désastreuses conséquences de la chute d’une goutte de pluie – Albin Michel Jeunesse 2021 [coll. Trapèze]

La journée s’achève, le soleil s’est couché. Tandis que le ciel s’est assombri, quelques dernières rougeurs éclairent un jeune garçon qui s’adonne à la peinture. Le dos courbé, le pinceau à la main, il s’applique face à son chevalet, en présence de deux adultes et d’une enfant installée sur les épaules de l’un d’eux. Enjambant une branche de l’arbre qui domine la scène, une fillette cueille des cerises. Moment de quiétude.

Mais d’où vient cette goutte de pluie, toute blanche, en haut de la page ? Pendant qu’elle tombe et que tout semble immobile, d’imperceptibles changements animent les images, l’une après l’autre. Le ralenti impressionne. Une cerise est déposée dans le panier, un oiseau traverse l’espace, une brindille au bec, une abeille bourdonne, un écureuil se déplace dans la ramure, un chien fait son entrée… Et la goutte de pluie de poursuivre sa chute verticale dans une indifférence générale. L’un des spectateurs a ôté ses lunettes ; sur sa branche, la fillette manipule son panier ; le peintre pose la dernière touche à son tableau, le chien circule la queue dressée ; l’abeille s’approche… et, finalement, elle se pose sur la queue du chien. Catastrophe, c’est sur elle qui déteste l’eau qu’aboutit la goutte de pluie. Instantanément tout valse en l’air. Horreur!

On ne sait ce que l’on doit le plus admirer dans cet album ? Serait-ce, l’objet-livre lui-même ! Remarquable par la verticalité et l’étroitesse de son format, par la lumière crépusculaire de sa couverture sur laquelle se détache le long titre, tel un calligramme qui mime la tombée de la goutte de pluie et dont la course se termine en une belle éclaboussure ? Serait-ce la chorégraphie de la lenteur et l’impact du ralenti qui, page après page, hypnotise le lecteur, suscitant chez lui une impression d’harmonie que rien ne pourrait troubler ? Est-ce la chute finale et ses conséquences désastreuses qui invitent à une réflexion sur le surgissement de l’inattendu et la fragilité du bonheur.

Michel Defourny

 

 

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