Souleymane Mbodj, Magali Attiogbé, Le Caméléon qui se trouvait moche, Les Editions des Éléphants 2019

Devinette : Connaissez-vous cet animal qui ressemble à un petit lézard ? Ses pattes griffues sont courtes, sa queue est souvent enroulée, ses gros yeux ronds roulent chacun de leur côté, il porte deux petites cornes sur une tête immobile, sa langue collante est longue. Vous hésitez ? J’ajouterai un dernier indice : sa peau change de couleur ! Vous avez deviné : c’est un caméléon !

Appréciation : Comment le trouvez-vous ? Fascinant, me répondez-vous ! Aussi singulier qu’un ornithorynque ! Quelque peu inquiétant ! Par contre, très sympathique…

Question complémentaire : Savez-vous où il vit ? Oui, dans les arbres de la savane africaine. Bravo, vous avez raison !

Nous en savons désormais assez pour écouter l’histoire contée par Souleymane Mbodj. Il était une fois un caméléon qui se trouvait moche, si moche qu’il ne pouvait voir son reflet dans l’eau du lac sans sombrer dans la mélancolie. Fiers de leur propre beauté, les habitants de la savane – girafe, panthère, lion, gazelle – partageaient son avis. Ils l’avaient même convaincu que sa laideur apportait la poisse. Dès lors, une consultation chez un thérapeute s’imposait, en l’occurrence une visite à une magicienne aux pouvoirs surnaturels. Et comme le conte africain est souvent conte de sagesse, proche de la fable à morale, Madame Sadio fit comprendre à son patient quelles étaient ses richesses et que pour être heureux, il était indispensable de s’accepter. Conclusion applicable à tous, qui que l’on soit, où que l’on soit : la beauté n’est pas affaire d’apparence, elle se trouve à l’intérieur de chacun.

Le conteur et musicien sénégalais Souleymane Mbodj a trouvé le juste ton pour toucher son public, entre écriture littéraire qui emploie le passé simple, temps de la narration, et tradition orale populaire qui privilégie le dialogue vivant et recourt à la verdeur de la langue pour rire un peu.

On ne se lasse pas de regarder les images de Magali Attiogbé, née au Togo et diplômée de l’école Estienne de Paris. Ses couleurs flamboient, tandis que son caméléon si attendrissant impressionne par la beauté de ses formes singulières, valorisée par une mise en page subtile, qu’il apparaisse en gros plan ou, changement d’échelle, qu’il faille le chercher çà ou là en raison de sa petitesse. La stylisation légère des animaux de même que la luxuriance de la végétation confèrent une identité forte à cet album paru en 2019 aux éditions des Éléphants. J’ajouterai pour terminer que j’adore les traits de crayons de couleur de Magali Attiogbé.

Michel Defourny

2 réponses sur “Souleymane Mbodj, Magali Attiogbé, Le Caméléon qui se trouvait moche, Les Editions des Éléphants 2019”

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